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AUTOUR DU "CENTRE DU MONDE"

 

GARE DE CERBÈRE
GARE DE CERBÈRE
LIGNE NARBONNE - PORTBOU • PK 508.817 • ALTITUDE 21 M

CERBÈRE / CERVERA DE LA MARENDA (66) • 42° 26' 29.2" N, 03° 09' 48.0" E

À CERBÈRE, EN FÉVRIER 1906, LA PREMIÈRE GRÈVE DE FEMMES CONNUE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR
COMMISSARIAT SPÉCIAL DES CHEMINS DE FER DE LA FRONTIÈRE - N° 58

Cerbère, le 28 février 1906
Le Commissaire spécial à Monsieur le Sous-préfet de Céret
Objet : Renseignements sur la grève des transbordeuses d’oranges de la gare de Cerbère.

Quoique n’ayant pas été appelé à intervenir dans les pourparlers qui ont précédé et suivi la grève des transbordeuses d’oranges à la gare de Cerbère, j’aurais eu l’honneur de vous adresser quelques renseignements, si j’avais su que M. le Maire chargé par l’administration de prendre toutes les mesures pour assurer l’ordre et toutes dispositions pour solutionner ce conflit, ne l’eût déjà fait.
Ci-après les renseignements que j’ai pu me procurer en dehors des réunions à huis-clos.

Action économique des ouvrières préposées au transbordement des oranges

L’écartement de la voie ferrée espagnole étant plus grand que celui des voies ferrées françaises, il s’ensuit que les marchandises venant d’Espagne, nécessitent une manutention en gare de Cerbère et leur transbordement sur le matériel des chemins de fer française. Les oranges arrivant en vrac, sont parmi les marchandises transportées, celles qui occupent pendant une certaine période, le plus de personnel. C’est ainsi que du mois de novembre au mois de mai suivant, une centaine de femmes sont employées par les agents des douanes ou commissionnaires, à ce transbordement. Ces femmes sont recrutées pour la plupart dans les familles d’employés de la gare de Cerbère.

Salaires

Chaque wagon à transborder occupe cinq femmes. Elles recevaient jusqu’à 0,75 centimes par wagon, sauf une qui remplissant le rôle de chef d’équipe recevait un franc. Une équipe de cinq femmes peut transborder jusqu’à trois wagons par jour, en raison de deux par wagon. Cependant, ce travail et par suite le salaire, est en rapport avec les arrivages d’Espagne. Il peut arriver que certains jours une équipe n’ait qu’un wagon à manutentionner.

Grève

Le 18 février courant, les transbordeuses d’oranges par l’intermédiaire de leurs maris, ont revendiqué une augmentation de salaire. Elles ont demandé que le taux, par wagon transbordé, fut porté à 1 franc pour celle qui gagnaient 0,75 et à 1,25 francs pour celles qui gagnaient 1 franc. Ces revendications portées à la connaissance des agents en douanes dans le courant de la semaine suivante, n’ont pas été acceptées, sous prétexte que la journée de la femme employée au transbordement ne dépassait guère une moyenne de quatre heures par jour.
La commission de la grève réunie le 25 février à la mairie, porta à la connaissance des transbordeuses la réponse faite à leurs revendications. La grève fut décidée pour le lendemain 26 du même mois.

Fin de la grève

La grève n’a duré qu’un jour, le lundi 26 février. Durant la soirée du 26, M. le Maire a convoqué la commission nommée par les agents en douanes. Celle-ci a accepté à l’unanimité les revendications des transbordeuses. Le salaire a été ainsi porté à 1 franc pour celles à 0,75 et 1,25 francs pour celles rétribuées à 1 franc.

Incidents

Aucun incident sérieux de nature à être signalé, ne s’est produit pendant le jour de la grève d’ailleurs, aucun incident n’était à craindre, étant donné la situation de famille des grévistes.

Observations

Le brigadier de gendarmerie auquel j’ai fait part de votre note du 27 courant par laquelle vous avez bien voulu me demander dans quelles conditions il a fait porter les hommes à la gare sans réquisition ni instructions, m’a répondu qu’il fournirait les explications nécessaires lorsqu’elles lui seraient demandées par les chefs.

Le Commissaire spécial